Voici un extrait d’une étude récente (Le nouveau « Paquet Énergie » de l’Union Européenne − Des résultats problématiques), parue le 30 janvier 2017 sur le site Géopolitique de l’énergie (Directeur de la Publication : Lionel Taccoen, Rédactrice en chef : Emma Legrand).
Les ménages allemands payaient, au premier semestre 2016, leur électricité 25% plus cher qu’au premier semestre 2010 (1). Plus de la moitié de leur facture est composée de taxes (2), dont presque la moitié pour financer les renouvelables (3). Ces dernières taxes sont la cause principale de l’augmentation récente des prix (depuis une dizaine d’années).
Dès 2012, l’alerte fut donnée sur les dérives financières des renouvelables. Le Gouvernement de coalition issu des urnes en 2013 chargea Sigmar Gabriel, Vice Chancelier social-démocrate de mener la réforme visant à mieux gérer les coûts. Ce dernier promit qu’il tenterait de les stabiliser, mais rien de plus. Même ce but ne fut pas atteint. La taxe finançant les coûts directs, restée à peu près constante de 2014 à 2016 autour de 6,25 centimes d’euro est passée à 6,88 c€/kWh en 2017 ! Le prix de l’électricité pour les ménages allemands va recommencer à augmenter (4). Mais le pire est encore à venir. Voici les dépenses passées et probables futures d’après une étude récente (5) :
Coût de la transition énergétique allemande, en m i l l i a r d s d’euros (Université de Düsseldorf, 2016)
Le Ministre Président vert du Bade Wurtemberg, Wilfried Krestchmann, protesta violemment contre ces chiffres « horribles » (6). Cependant, l’étude provient du Düsseldorf Institute for Competition Economics (DICE) dont la réputation n’est plus à faire. Constatons qu’en 2017, compte tenu de l’annonce de l’augmentation de la taxe finançant les renouvelables, le soutien public à ces énergies passera de 23-24 milliards d’euros par an, constatés pour 2014 à 2016, à 26 milliards d’euros par an. Aucune baisse n’est annoncée : ce chiffre conduit à 260 milliards en dix ans, par très loin de l’estimation du DICE. Par ailleurs, les coûts liés à l’adaptation des réseaux sont un peu inférieures aux annonces ultérieures ! (7).
L’étude constate que de 2000 à 2025, une famille allemande de quatre personnes « aura payé directement ou indirectement 25’000 euros pour la transition énergétique ». Or 40% des ménages allemands ont, suivant la Bundesbank, des actifs inférieurs à 27’000 euros (8). L’étude montre aussi que l’impact sur la facture des ménages sera encore plus important que par le passé. Certains secteurs industriels (dont l’extraction du charbon) ont obtenu de la Commission européenne des dégrèvements de taxes sur les renouvelables…, ce qui augmente la part payée par les ménages.
Le Gouvernement allemand a l’œil rivé sur la facture. Certes, il se montre triomphaliste sur la croissance spectaculaire de la part des renouvelables dans l’électricité [ un peu plus de 29%, dont 12% d’éolien, 7% de biomasse, 6% de PV, 3% d’hydraulique et 1% d’ordures ménagères ; à cela s’ajoutent 13% de nucléaire et enfin encore 53% d’agents fossiles, sources de près de 300 Mt de CO2, un bon tiers des plus de 900 Mt CO2 d’émissions du pays… ]. Ce secteur capte l’essentiel des aides…, mais il ne représente que 20% de l’énergie totale. La part des renouvelables dans la consommation totale d’énergie reste modeste et inférieur au taux français. Il n’a cru que de 12,4% à 12,6% de 2015 à 2016 (9). Il ne s’agit que d’une seule année, mais nous retrouvons là le rythme affaibli observé et prévu dans le futur par la Commission et l’Agence de l’Environnement Européenne si les « politiques actuelles » ne changent pas. Les investissements dans les renouvelables ont continué leur baisse en Allemagne, –16% en 2016 par rapport à 2015 (10), ce qui complète le tableau. L’Allemagne étant un pays prospère, la réaction des pays aux budgets problématiques à l’augmentation des dépenses publiques liées aux renouvelables est évidente. On comprend les fortes réductions des aides amorcées par le Gouvernement espagnol socialiste de Zapatero et confirmées par les conservateurs. En France, les aides aux renouvelables continuent à augmenter, 4,2 milliards en 2015, 5,1 milliards en 2016, et 5,65 milliards d’euros prévus en 2017 (11). Mais les investissements dans les renouvelables en 2016 ont baissé de 5% (12). Dans une publication récente, l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) traite des « Coûts des renouvelables en France » (13). Mais, contrairement au Rapport allemand du DICE, le coût total pour la collectivité n’est pas abordé (le montant des aides indiquées ci-dessus n’est pas cité)… Or c’est ce coût global qui influe sur les dépenses publiques donc sur les réactions des gouvernants.
Lionel Taccoen, Emma Legrand
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- De 23,75 à 29,69 centimes d’euro le kWh du premier semestre 2010 au premier semestre 2016 (Eurostat nrg_pc_204).
- 52% Cf. Communiqué Eurostat du 27.05.2016. En France 34% de taxes.
- Cette taxe est en 2017 de 6,88 c€ sur un prix total d’environ 30 c€.
- Comme le confirme la presse. Cf. Frankfurter Allgemeine Zeitung du 10.10.2016.
- Pour notre part, nous avons utilisé les informations fournies par Daniel Wetzel dans Die Welt du 10.10.2016.
- Cité par Die Welt, voir note précédente.
- Les réseaux de transports électriques allemands annoncent début 2017 de 34 à 36 milliards € d’investissements d’ici 2030.
- Cité par Die Welt, voir note 5.
- Agence Deutsche Welle, en date du 9.01.2017, « Bilan CO2 2016, l’Allemagne fait un pas en arrière » (chiffres provenant des producteurs d’énergie (AGEB).
- GreenTech Media, citant le Rapport de Bloomberg du 12.01.2017.
- Délibérations de la Commission de Régulation de l’Électricité du 13.07.2016.
- Cf. note 9.
- Rapport de janvier 2017.
Excellente étude objective et réaliste sur le site « Géopolitique de l’énergie » !
L’OFEN devrait en prendre de la graine pour une future stratégie en Suisse, sans survaloriser l’apport escompté des énergies renouvelables…
Merci à Christophe de Reyff pour cette contribution importante !