Nous commençons ici une discussion de cette tant attendue nouvelle loi, dite « Loi sur le CO2 », forte de 87 articles sur 40 pages (!), un bijou de loi, donc, que chaque citoyen devrait normalement avoir lue et méditée… avant de voter en toute connaissance de cause.
Voici la formulation des objectifs dans ce projet de loi qui sera fort probablement soumis au référendum (délai référendaire au 14 janvier 2021) :
« Art. 3 Objectifs de réduction
1 En 2030, les émissions de gaz à effet de serre doivent avoir été réduites d’au moins 50 % par rapport à 1990. Entre 2021 et 2030, les émissions de gaz à effet de serre doivent être réduites d’au moins 35 % en moyenne par rapport à 1990. »
Nulle part dans ce projet ne sont précisément indiquées la valeur de référence ni la valeur cible. On parle bien ici des gaz à effet de serre (GES) et pas seulement du CO2 ; il s’y ajoute donc le méthane CH4, le protoxyde d’azote N2O et les divers gaz synthétiques, hydrofluorocarbones HFC, hydrocarbures perfluorés PFC, hexafluorure de soufre, hexafluorure de soufre SF6 et trifluorure d’azote NF3, le tout converti en équivalent CO2 en tenant compte du potentiel de réchauffement global de chacun de ces gaz.
Selon les données statistiques de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), on avait :
en 1990 :
CO2 : 44,52 ; CH4 : 6,09 ; N2O : 2,85 ; gaz synthétiques : 0,25 ; total : 53,71 MtCO2éq (millions de tonnes en équivalent CO2 ).
et en 2018 :
CO2 : 36,98 ; CH4 : 4,84 ; N2O : 2,88 ; gaz synthétiques : 1,72 ; total : 46,42 MtCO2éq
un total qui représentait en 2018 encore 86,4% du total en 1990 ; la diminution du total a donc été modestement de 7,29 MtCO2éq, soit -13,6% et cela a été atteint en 28 ans. Pour le seul CO2, la diminution a été de 7,56 Mt, soit -17%. Que s’est-il passé durant ces année ? Ce sont les émissions de gaz synthétiques qui ont crû de 1,47 MtCO2éq.
Selon la nouvelle loi sur le CO2, on devrait arriver entre aujourd’hui et 2030, soit dans 10 ans, à passer de -13,6% à -50%, soit une réduction considérable par rapport à 1990, c’est -à-dire atteindre finalement un total de 26,85 MtCO2éq, donc une diminution à réaliser d’encore 19,57 MtCO2éq, soit 2,6 fois l’effort fait en 28 ans, un chiffre qui représente aussi tout de même 42% de réduction par rapport aux 46,42 MtCO2éq de 2018 !
Bref, il a fallu 28 ans pour obtenir 13,6% de réduction entre 1990 et 2018 et le législateur veut arriver à réduire encore de 42% par rapport à 2018 d’ici 2030, soit en 10 ans. Il précise dans la deuxième phrase de l’article 3, alinéa 1, que ce serait 35% de réduction à réaliser par rapport à 1990, soit -18,8 MtCO2éq, dès 2021 et jusqu’en 2030. Cela présuppose que l’on en sera encore à 45,65 MtCO2éq en 2021.
Nous sommes pourtant mieux lotis que l’Union Européenne qui vise désormais d’ici à 2030 pas moins de 60% de réduction au lieu des 40% prévus antérieurement, toujours par rapport aux émissions de 1990.
Cela a donné l’occasion de la publication d’un brûlot par Vincent Brenat dans Contrepoint du 12 octobre 2020, sous le titre flamboyant :
CO2 : 60 % de réduction d’ici 2030, un objectif mortifère
Notre collègue Michel de Rougemont s’est aussi donné le plaisir ce même jour d’un article sur son blog qui n’y va pas avec le dos de la cuillère :
Une loi qui doit faire pschitt
Deux lectures roboratives…
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